« MANGALISATION » - LE NOUVEAU PÉRIL JAUNE


Date : 29 janvier 2006


Invités :
    - Emmanuelle Lavoix, des éditions Lézard Noir
    - Frédéric Boilet, auteur et directeur de la collection Sakka
    - Jean-Louis Gauthey, des éditions Cornélius
    - Benoît Maurer, des éditions IMHO


Animateur :  ?


L'intitulé de cette rencontre (organisée par les Littératures Pirates et pas par le FIBD) la présentait comme une occasion de réagir au récent terme « mangalisation », lancé par Gilles Ratier et récupéré opportunément par les médias. Et de réfléchir aux préjugés et craintes qu'il semble véhiculer. En réalité, on s'apercevait qu'il s'agissait d'une occasion pour faire discuter 4 acteurs singuliers (et franchement intéressants) de l'édition du manga en France. L'animateur aiguillait les invités sur quelques sujets puis les laissaient parler, débattre et échanger entre eux librement.
Le présent document essaye de donner un aperçu du riche contenu de la rencontre plus que de son déroulement. Pour cela, j'ai décidé de résumer les interventions qui m'ont marqué en les classant par thème, sans forcément respecter leur enchaînement réel. Dans la mesure du possible, ces enchaînements seront toutefois indiqués.

Présentation des invités

Pour commencer l'animateur demandait tout simplement aux invités de se présenter, et à chacun d'expliquer comment il avait découvert le manga, comment il en était venu à s'y intéresser et à en éditer. Partie d'autant plus utile que le public de la rencontre n'était pas forcément familier avec les éditeurs présents.

Jean-Louis GAUTHEY pour Cornélius :

J-L.G. commençait par expliquer que selon lui toute personne qui s'intéresse à la BD mondiale ne peut pas ne pas s'intéresser au manga. Mais par contre il y a un problème de contact pour en éditer. Puis il racontait qu'il avait découvert le manga avec la revue Le Cri qui Tue. Il avait particulièrement été marqué par Tatsumi. Ensuite, il avait continué avec les éditions américaines d'Akira, de Maruo... et en achetant de l'import VO à Un Regard Moderne [1].
En tant qu'éditeur par contre, il a longtemps pensé qu'il était impossible d'éditer du manga. Entre autres, parce qu'il entendait plein d'histoires sur les éditeurs japonais. Mais il s'est aperçu que c'était faux, comme beaucoup d'autres idées reçues qui ont « intoxiqué » les Français au sujet du Japon dans les années 80. Il expliquait également qu'il aime beaucoup Dragon Ball - qu'il éditerait si les droits étaient libres! - même s'il préfère Dr. Slump.
[2 (pour en savoir plus sur Jean-Louis Gauthey et Cornélius)]

Frédéric BOILET pour lui-même et Casterman (plus particulièrement la collection Sakka) :

F.B. expliquait d'abord qu'il était parti découvrir le Japon à cause de tous ces préjugés véhiculés par les médias au sujet du Japon et des Japonais dans les années 80. Le quotidien des Japonais ne trouvait pas de place dans les histoires des médias alors il a pensé qu'il serait intéressent d'aller voir ce qu'il en était vraiment. Il a fait un premier voyage (où il a entendu parler pour la première fois de « la manga », cf. partie dédiée) vers 1990 et est revenu y vivre à partir de 1993.
Naturellement, il s'est intéressé à la bande-dessinée japonaise, mais il lui a fallu du temps pour trouver quoi lire et surtout des auteurs qui lui plaisaient [3].
Quand il est revenu en France vers 1994-1995, il a découvert le boom de l'animation japonaise et du manga. Mais ce qui était édité ne correspondait pas du tout à ce qu'il avait découvert au Japon. La diversité du marché japonais n'était pas représentée. Il a donc commencé à présenter des auteurs aux éditeurs français dès la fin des années 90 [4] (Il a par exemple envoyé un colis de livres à l'Association!) C'est comme cela que Casterman a « accepté » Quartier Lointain de Taniguchi [5] et Ego Comme X a décidé d'éditer L'Homme sans Talent de Tsuge. Cependant il a fallu plusieurs années pour faire l'adaptation française de L'Homme sans Talent [6]. Finalement, suite au succès de Quartier Lointain, Casterman lui a proposé de créer une collection de mangas matures et adultes qui « se démarquent », ce qui conduira à la création de Sakka [7] .
[8 (pour en savoir plus sur Frédéric Boilet)]

Benoît MAURER pour IMHO :

B.M. expliquait avec humour avoir été « vraiment l'otaku de base » (cf. la note "pour en savoir plus"). Il racontait qu'il avait été élevé aux séries télés japonaises et que donc sa découverte du manga était passée par l'animation. Il a alors commencé par lire des shounen et des shoujo [9]. Mais vers 21 ans il a eu envie de lire autre chose et il a commencé à découvrir la richesse (en terme de formats, de graphismes...) du manga. Il reconnaissait aussi être venu sur le tard au manga et à la BD, puisqu'il ne s'est mis que « récemment » à lire autre chose que des BDs japonaises.
Pour conclure, il précisait qu'il ne veut pas qu'IMHO soit cantonné à un éditeur de BD, et a fortiori un éditeur de manga. Ses centres d'intérêts sont multiples (poésie, art contemporain, littérature...) et le catalogue d'IMHO reflète cela [10] . Il expliquait pour illustrer cette volonté de diversité qu'IMHO allait par exemple rééditer un livre de gravures allemandes.
[11 (pour en savoir plus sur Benoît Maurer et IMHO)]

Emmanuelle LAVOIX pour Le Lézard Noir :

E.L. commençait sa présentation en expliquant que Le Lézard Noir n'est pas un éditeur de manga. Elle se présentait plutôt comme passionnée par l'Underground, l'Avant-garde japonais [12] . Avant-garde qui s'exprime aussi au travers du manga et de l'illustration. Mais elle précisait qu'elle préférerait que ses livres soient classés en littérature et pas au milieu des mangas.
Au sujet de ses débuts dans l'édition de manga, elle expliquait être juste tombée « amoureuse » de Maruo et avoir voulu le sortir en France. Elle ajoutait que tous les choix de publication du Lézard Noir se faisaient « au feeling ».
[13 (pour en savoir plus sur Le Lézard Noir)]

La dernière remarque de E.L. faisait s'exclamer J-L.G. : « c'est le cas de nous tous, non ? ».

La (Nouvelle) Manga

Inévitablement F.B. était interrogé par l'animateur sur La Nouvelle Manga et plus particulièrement sur son utilisation du mot "manga" au féminin.
Il rechignait pourtant à répondre. Premièrement, il affirmait que c'était une « longue histoire » et que s'il commençait à la raconter, il allait monopoliser le temps de parole sur toute la conférence. Deuxièmement, il expliquait qu'il pense avoir fourni toutes les explications nécessaires et répondu à toutes les questions dans le Manifeste (disponible sur son site) et dans le « commentaire du Manifeste » [14] .
Toutefois il finissait par raconter que les premières fois où il a entendu parler de manga au Japon, le mot était mis au féminin. Il ne sait pas vraiment pourquoi, mais il pense que c'est à cause de la sonorité en "a" qui fait féminin et au fait que le mot français "Bande-Dessinée" soit féminin. Il rappelait aussi qu'un livre d'Hokusai avait été édité en France sous le nom de La Manga d'Hokusai [15] .
[16]

Japon: préjugés et réalités

J-L.G. et F.B. ont évoqué durant la conférence les préjugés sur le Japon et les Japonais véhiculés dans les années 80 par les médias. Tous deux ont expliqué leur aversion pour ces préjugés et leurs conséquences sur leur travail d'auteur et/ou d'éditeur.
En réagissant à ce que disait J-L.G. et après avoir expliqué que ces préjugés l'avait poussé vers le Japon, F.B. avançait qu'ils avaient diminué à partir des années 90 parce que le Japon avait commencé à faire « moins peur » économiquement : diminution des exportations de biens, récession économique... Mais la situation peut changer car le Japon exporte récemment, et avec un succès grandissant, sa culture populaire (ou une partie) avec aux premiers rangs l'animation, les mangas et les jeux vidéos. Ce qui pourrait faire ressortir de vieux élans protectionnistes... qu'on pourrait sentir poindre dans l'expression « mangalisation » par exemple.
Même si la conférence ne développait finalement pas ce thème, pourtant inscrit dans sa description, elle donnait lieu à quelques remarques intéressantes sur le marché japonais du manga.


A la suite de sa remarque sur les exportations culturelles du Japon, F.B. précisait pourtant que les éditeurs japonais de manga sont encore très tournés vers leur marché intérieur. Ils sont encore peu intéressés par l'étranger, même si cela commence à changer. Toutefois il pense que ces éditeurs japonais n'ont pas de « stratégie de conquête » comme certains semblent le penser [17] . Il affirmait ainsi que si les éditeurs japonais voulaient conquérir les marchés étrangers, ils l'auraient déjà fait... et qu'il n'y aurait plus de BD franco-belge depuis 20 ans. Il justifiait le centrage des éditeurs japonais sur leur marché local par son importance sans comparaison. Pour étayer, il citait les chiffres de tirage/vente de Monster d'Urasawa :
    - au Japon, un tome de Monster a un premier tirage de 900 000 exemplaires (F.B. affirmait tenir le chiffre d'Urasawa);
    - en France, F.B. estime généreusement les ventes à 20-30 000 exemplaires par tome [18] ;
    - en Espagne, où F.B travaille avec l'éditeur de Monster [19] , il sait que les ventes sont d'environ 8000 exemplaires par tome.
[20]


F.B. réagissait aussi au sujet du problème de contact pour éditer du manga évoqué par J-L.G.. Il expliquait alors que pour faire une édition étrangère on a affaire avec les « gens qui ont les droits », les éditeurs. Et qu'il est finalement très difficile de rencontrer les auteurs [21] . J-L.G. se retrouvait manifestement dans ce commentaire puisqu'il ajoutait que les « Japonais essayent de créer une membrane » entre les auteurs et les éditeurs étrangers. Et que « si tu la contournes, ça les rend fous ». Il expliquait s'être même fait « engueuler » pour avoir ignoré cette manière de faire.
[22]


Une question du public lançait la question de la pénétration des BDs étrangères au Japon. Question qui obtenait une réponse rapide : il n'y a pas de pénétration de la BD étrangère au Japon.
F.B. précisait que les Japonais traduisent très peu et que quand ils traduisent il n'y a pas de succès. Il ajoutait aussi que les Japonais souffrent d'un manque de connaissance et de contacts à ce sujet. J-L.G., manifestement parfaitement d'accord, renchérissait en disant que les Japonais « n'accrochent pas » aux BDs traduites. Au sujet du manque de connnaissance, il donnait comme exemple le fait que Blanquet a été traduit au Japon, mais dans une collection pour enfants!

Le « Péril Blanc » : catégorisation et ghettoisation du manga en France

La rencontre donnait lieu à plusieurs remarques (plutôt polémiques d'ailleurs) sur le marché français du manga.


F.B. et J-L.G. s'interrogeaient (voire se plaignaient) sur le besoin, très français selon eux, de ranger les bandes-dessinées japonaises sous une étiquette « manga ». Ils disaient par exemple qu'il n'existe pas de terme classifiant les films selon leur origine géographique.
Au sujet de ce "besoin de catégorisation", B.M. tentait, lors de sa présentation, un début de justification. Il expliquait que les formats classiques, standards de la BD [23] - le 46 planches couleurs (franco-belge), le comic-book (américain) et le tankoubon (japonais) - sont très différents. Et qu'une telle différence de format n'existe pas pour les films. Ce qui selon lui pourrait expliquer l'existence des termes de « Franco-Belge », « Comics » et « Manga » pour classifier les BDs.


Les 3 éditeurs présents ne sont pas des éditeurs spécialisés manga. Ils n'ont pas non plus de collection "manga" (J-L.G. s'est clairement prononcé contre dans son interview pour Libération par exemple) au contraire de Casterman avec Sakka, dirigée par F.B..
A la fin de sa présentation, juste après avoir évoqué la création de cette collection, F.B. se déclarait pourtant opposé au concept de collection réservée aux mangas. Il qualifiait même cela de « collection ghetto ». Il affirmait ainsi préférer des collections comme Ecritures [24] . Il pense qu'il ne vaut mieux pas rassembler les mangas dans une collection, mais, pragmatique, qu'il faut le supporter si on ne peut pas « faire autrement ». Il expliquait alors pourquoi il avait accepté de diriger Sakka : l'offre de Casterman, même s'il s'agissait d'une collection « ghetto », était trop belle pour qu'il la refuse. Et il ne regrette pas puisque Casterman accepte ainsi de publier les auteurs qu'il voulait voir traduits...


F.B. s'en prenait également aux éditeurs français de manga en affirmant que leur choix éditoriaux étaient « dangereux pour le marché ». Ces choix enferment en quelque sorte le manga dans des formats et des genres. Ce qui est dangereux aussi pour l'image de la BD japonaise. Il résumait sa pensée en affirmant que pour lui il n'y a pas de "Péril Jaune", mais plutôt un « Péril Blanc ».  [25]
Les 3 éditeurs, pas vraiment portés sur le mainstream (en manga ou pas d'ailleurs), étaient manifestement d'accord. J-L.G. racontait ainsi que quand il va vendre Cornigule ou du Tezuka [26] en boutique spécialisée (de manga), on lui répond que « ce n'est pas du manga ». Et cela pour diverses raisons qu'il trouve manifestement très énervantes (surtout celle du prix) : « c'est plus cher que 7euros50 », « c'est trop vieux » voire « le manga c'est du shounen »... [27]
B.M. semblait avoir eu des expériences similaires avec ses Nekojiru ou ses Junko Mizuno [28] .
F.B. rétorquait alors que c'est ce qui arrivé quand on prend un nom de marché et qu'on « essaie de faire croire que c'est un genre ».
[29]


F.B. reconnaissait toutefois que le manga avait amené un public féminin vers la BD (au sens large du terme). Ce qui est quelque chose de « très positif », entres autres pour l'image du manga.

Adaptation graphique et sens de lecture :

Les invités étaient lancés sur le sujet hautement polémique de l'adaptation graphique des onomatopées japonaises par une question de votre serviteur.
En fait, l'animateur faisait circuler dans la salle des livres des éditeurs présents. J'étais alors étonné de voir dans un des Maruo de Lézard Noir une page pleine d'onomatopées japonaises, sans adaptation ou traduction apparente (mais j'ai pu les rater). Je savais également que la situation chez IMHO était très diverse:
   - Junko Mizuno adapte elle-même toutes ses onomatopées;
   - celles des livres d'Hino sont laissées telles quelles (quitte à oublier de traduire du texte hors bulle);
   - sur les deux premiers Nekojiru, seules les onomatopées faciles à adapter (fond uni, petite taille...) sont remplacées. Mais les prochains tomes seront complétement adaptés [30] ;
   - pour Bambi, la question se pose encore. En effet les onomatopées de Kaneko Atsushi sont assez imposantes et surtout très travaillées graphiquement. Elles pourraient donc bénéficier d'un sous-titrage comme c'est le cas dans l'édition américaine [31] .
Je décidais donc de lancer les éditeurs présents sur ce thème qui en plus m'intéresse.


Les réponses des invités étaient alors très variées et partagées:
   - E.L. expliquait simplement avoir conservé les onomatopées japonaises de Maruo parce qu'elles étaient « jolies »;
   - J-L.G. pensait lui aussi qu'il est dommage de remplacer les onomatopées japonaises qu'il trouve très esthétiques. Il racontait que pour l'edition française de Cornigule toutes les onomatopées ont été remplacées. Et qu'il n'est finalement pas satisfait du résultat. Il a donc l'intention de refaire une édition avec les onomatopées japonaises. Il poursuivait en expliquant qu'au contraire dans Prince Norman les onomatopées de Tezuka ont été conservées. Mais celles qui ne sont pas immédiatement compréhensibles ont été "sous-titrées" entre les cases.
   - F.B. parlait pour sa part de la grande complexité que représente l'adaptation graphique des mangas [32] . Il avouait que Sakka avait du mal à ce sujet et commençait seulement, après deux ans d'existence à trouver des bons graphistes.
Finalement, il en ressortait que les choix des éditeurs présents étaient variés. Et que ces choix pouvaient changer à chaque œuvre éditée, en prenant en compte l'esthétique des onomatopées concernées, la difficulté de leur adaptation, voire les moyens (délais et coûts...) disponibles. On pouvait quand même s'apercevoir que ces éditeurs accordent une grande importance à l'esthétique graphique des onomatopées et rechignent à les adapter complètement.


En continuant sur son argument de la difficulté d'adaptation graphique (des onomatopées japonaises), F.B. expliquait qu'il conseille d'ailleurs aux auteurs japonais de la prévenir. Il leur conseille de désormais penser aux éditions étrangères, de plus en plus fréquentes et plus du tout inimaginables, et d'essayer de faciliter l'adaptation de leurs livres. En mettant par exemple les dessins, les bulles et les onomatopées sur des fichiers informatiques différents [33] . Voire même en dessinant directement dans le sens de lecture de gauche à droite... quand cela est bien sûr compatible avec la publication japonaise. Ce qui exclut pratiquement tous les mangas prépubliés.
Il précisait que pour beaucoup d'auteurs ce changement de sens de dessin est facile, voire même amusant. Par exemple, les auteurs japonais qui ont participé au collectif Japon ont réalisé leur planches dans le sens "gauche à droite", qui est le sens de publication du livre même au Japon [34] . En fait, seul Matsumoto Tayou s'était senti « gêné » et avait contourné cette gêne en réalisant son histoire avec des dessins en une planche.


A la suite de cela, une intéressante digression sur le sens de lecture démarrait :
F.B., sans doute pour justifier son conseil aux mangaka de changer leur sens de dessin, précisait que l'expression « sens de lecture occidental » n'a pas réellement de sens. D'abord parce que seuls les Japonais publient traditionnellement de la BD de droite à gauche, ce qui fait du "sens occidental" un « sens non japonais » en fait [35] . Ensuite parce que les Japonais utilisent aussi, et même fréquemment, le sens de lecture dit "occidental", c'est à dire de gauche à droite [36]. Il expliquait alors que le sens de lecture "droite vers gauche" est associé au lettrage vertical des textes. Mais les texte lettrés horizontalement se lisent eux de la gauche vers la droite [37] .
J-L.G. ajoutait alors qu'effectivement de nombreuses revues et pas mal de livres, notamment pour enfant, sont publiés au Japon dans le sens "gauche vers droite".
[38]

par Mathieu LAGREZE


[1] Un Regard Moderne est une librairie parisienne, connue pour être une véritable caverne d'Ali-Baba pour tout ce qui touche à l'underground... et célèbre pour son absence totale de rangement intelligible.

[2] Pour en savoir plus sur Jean-Louis Gauthey et Cornélius :
je vous conseille deux interviews :
   - celle parue dans le numéro 20 de la revue Jade en 2000
   - celle publiée dans Libération le 26 janvier 2006, à l'occasion du Festival.

[3] Je n'ai aucun mal à le croire sur ce point. Il suffit de mettre les pieds dans une librairie japonaise pour se rendre compte de l'immensité de la production japonaise... et du peu d'intérêt d'une grande partie de cette production.
Si en plus vous êtes un peu difficile en terme de Bande Dessinée....

[4] Il faut noter qu'il est reparti (définitivement ?) au Japon en 1997.

[5] En fait, Casterman avait déjà publié du Taniguchi: L'Homme qui marche en 1995, les 2 tomes du Chien Blanco en 1996-97 et les 3 tomes du Journal de mon père en 1999-2000.
Par contre, F.B. s'est occupé de la traduction et de l'adaptation graphique des 2 volumes de Quartier Lointain (parus en 2002 et 2003). Vu ce que je sais de lui, je ne serais pas étonné qu'il se soit aussi occupé des droits pour ce titre.
Je conclus donc de l'utilisation de ce terme « accepté » que F.B. n'était sans doute pas impliqué dans les premières traductions de Taniguchi par Casterman.

[6] L'Homme sans Talent est finalement paru en 2004 chez Ego Comme X.

[7] Je conseille fortement de lire le livret de lancement de Sakka, envoyé aux libraires en septembre 2004, pour en savoir plus sur le concept de la collection.
Ce livret (~11Mo) peut être téléchargé sur mon espace personnel.

[8] Pour en savoir plus sur Frédéric Boilet :
il suffit d'aller voir son très complet site personnel.

[9] schématiquement (et respectivement) les mangas à destination des jeunes garçons et des jeunes filles (le cœur de cible étant les collégien(ne)s).

[10] IMHO édite ainsi 2 revues de littérature et d'Arts: Inculte et Art-It: cf. le catalogue de l'éditeur.

[11] Pour en savoir plus sur Benoît Maurer et IMHO :
je vous conseille deux interviews :
   - celle donnée en tant que en tant que rédacteur en chef de Japan-Mania(!) en 2002 à Nihon-fr. Il ne s'est pas "vanté" de cette expérience lors de la conférence... Cela aurait pourtant appuyé son affirmation d'être un otaku "repenti" :-).
   - celle accordée à Arte en avril 2004 pour la sortie de Cinderella de Junko Mizuno

[12] D'où le slogan « Avant-Garde et japonisme décadent » présent sur le site de l'éditeur.

[13] Pour en savoir plus sur Le Lézard Noir :
la présentation de l'éditeur sur son site me paraît tout indiquée.

[14] C'était la première fois que j'entendais parler d'un tel « commentaire du Manifeste ». Quoiqu'il en soit, si j'ai bien compris, il s'agit de l'interview réalisé par Julien Bastide pour Animeland en novembre 2001. On la trouvera au sein d'un dossier réalisé pour la sortie française de L'Épinard de Yukiko.
sur ce point, je veux bien être d'accord avec lui. En effet la plupart des personnes que j'entends critiquer Boilet et/ou la Nouvelle Manga n'ont manifestement pas lu et/ou pas compris le Manifeste.

[15] Je n'ai pas réussi à identifier ce livre, mais je l'ai vu cité à plusieurs reprises. Je suppose qu'il s'agit d'un ouvrage rassemblant certaines (il y a 15 volumes japonais de "manga" d'Hokusai) des illustrations/croquis qu'Hokusai avait lui-même baptisés "manga"... créeant ainsi le terme passé depuis à la postérité.

[16] C'était la première fois que j'entendais Boilet évoquer sa découverte du mot "manga" et de son emploi au féminin.
Il faut quand même reconnaître qu'il y a effectivement un emploi historique de "manga" au féminin, avant que le mot ne se répande et se popularise, cette fois au masculin...
En ce qui concerne l'emploi qu'en fait Boilet, il reconnaît facilement que l'utilisation du féminin est grosso-modo une méthode "marketing" qu'il a utilisée à l'époque du Manifeste pour faire connaître le type de manga qu'il voulait voir publier. On pourra d'ailleurs remarquer que maintenant il utilise fréquemment "manga" au masculin (par exemple dans le livret de présentation de Sakka cf. [7]) et que son emploi au féminin est plutôt réservé à l'évocation de La Nouvelle Manga.

[17] Il s'agit d'une crainte récurrente. Elle n'est pas justifiée par grand chose, si ce n'est l'intérêt manifestement accru des éditeurs japonais pour les marchés étrangers (surtout européens et américains), qu'ils ont longtemps négligés. Mais agiter l'épouvantail de l'arrivée des éditeurs japonais fait bien dans une analyse qui cherche à faire dans l'alarmisme...

[18] Gilles Ratier donne le chiffre de 30 000 exemplaires tirés pour le 18e et dernier tome de Monster paru en 2005.

[19] Il s'agit de Planta obstiniez.

[20] Ces chiffres parlent d'eux-mêmes, je pense... Pour ceux qui ne seraient pas convaincus, on pourrait parle de One Piece, par exemple, qui vend au Japon environ 2 millions d'exemplaires par tome et qui tire en France à 50 000 exemplaire par tome (toujours selon Gilles Ratier).

[21] Ce qui est quand même parfaitement normal dans les rares cas où ces auteurs sont malheureusement décédés, comme Tezuka pour ne citer qu'un exemple...

[22] Moralité : la plupart du temps quand un éditeur se targue de « respecter la volonté de l'auteur », c'est surtout du marketing... pour ne pas dire du pipeau complet. Par exemple, respecter systématiquement le format et la maquette de l'édition japonaise pour une édition française revient sans doute bien plus à respecter la politique de collection de l'éditeur japonais, que la volonté ou les envies de l'auteur...

[23] Petit rappel simplificateur sur ces formats "standards" :
   - le format standard franco-belge est le 46 planches couleurs, couverture cartonné, autour de 22x30 cm;
   - le format standard américain est le "comic-book", une trentaine de pages couleurs, couverture souple, environ 17x26 cm;
   - le format standard japonais est le "tankoubon", environ 180 pages N&B, couverture souple avec jaquette, il existe en 2 tailles: B4= 11,5x17,5 cm (typique du shounen) et B6: 13x18,5 cm (typique du seinen).

[24] Ecritures est une collection chez Casterman.
Elle rassemble sans distinction des auteurs français, anglais, américains, japonais... des parutions originales et des traductions de comics, de manga...

[25] C'est certes discutable, mais cette idée que les éditeurs, derrière le succès des chiffres (eux-mêmes à discuter d'ailleurs) font finalement du mal à l'image du manga en France n'est pas si incroyable. Surtout quand les discussions sur la surproduction, les prix trop élevés ou le travail éditorial (format, maquette, traduction, adaptation...) bien trop souvent bâclé vont bon train sur les forums.

[26] Prince Norman dans son cas.

[27] Il peut paraître étonnant d'entendre ainsi des libraire spécialisés (des connaisseurs normalement) rejeter des œuvres japonaises pour des motifs aussi futiles que leur âge, format, prix et/ou style graphique. Ou pour résumer parce qu'elles ne correspondent pas aux canons du manga mainstream (du moins celui publié en France).
Serait-il si loin ce temps où le seul fait d'affirmer que « Taniguchi ce n'est pas du manga  » déclenchait les foudres de fans militant pour la reconnaissance de la diversité du manga, face aux préjugés ?
Et pourtant, personnellement je ne suis pas surpris. Simplifier le manga en l'identifiant (le limitant) aux formats, genres et styles de ses succès éditoriaux semble être devenu une habitude pour les médias (le manque de connaissance aidant) et pour les grands éditeurs (le réalisme marketing aidant)... mais aussi pour les déclarés "fans" ce qui est plus inquiétant.

[28] Les livres de Junko Mizuno réalisent quand même l'exploit d'être chers, dans un format étrange (14 x 20.5 cm), avec un style graphique tout à fait singulier, en sens de lecture occidental et en couleurs! C'est peut-être conforme à la volonté de Junko Mizuno, mais si IMHO cherchait les ennuis sur le marché français du manga, ils n'auraient pas fait mieux :-)

[29] Là je dois bien avouer que je suis 100% en accord avec ce que dit Boilet. "Manga" désigne la bande-dessinée japonaise, c'est à dire les BDs publiées initialement au Japon. Le terme recouvre donc le marché japonais au complet. Prétendre autre chose, surtout quand il s'agit de limiter le manga à ses formats et/ou genres dominants (i.e. le shounen bien souvent en France), c'est tomber dans une généralisation dommageable.
On remarquera aussi que le même phénomène touche les marchés américains et européens, puisqu'il n'est pas rare de voir le Comics limité aux comic-book de super-héros et le marché européen aux 46 planches couleurs, couverture cartonnée. Tout ce qui ne rentre pas dans ces formats standards, est classé pêle-mêle et au gré des fantaisies, dans l'indépendant, l'underground, l'alternatif voire le très pratique "roman graphique"...

[30] par le studio GB One

[31] On peut voir quelques planches sur le site de l'éditeur américain DMP.

[32] Chez Sakka, les onomatopées sont remplacées. Par contre les textes japonais (panneaux, enseignes, livres...) sont en général laissés tels quels, mais sous-titrés.

[33] Il sera peut-être bon de rappele ici que F.B. travaille beaucoup à l'ordinateur.

[34] Voir le site de F.B. où il évoque « une série de créations internationales en sens de lecture gauche-droite ».

[35]On pourra nuancer cette affirmation. En effet quelques recherches permettent d'affirmer que les BDs israéliennes et arabes (2 langues qui se lisent de la doite vers la gauche) peuvent elles aussi être publiées dans le sens "japonais".
Quelques liens pour illustrer cette remarque :
   - des planches de super-héros israéliens qui se lisent manifestement de la droite vers la gauche;
   -  une annonce de DC Comics qui cherche un dessinateur pour réaliser une série de comic-books pour l'armée américaine à destination du Proche Orient (!) et qui précise bien que le sens sera de la droite vers la gauche;
   - un article au sujet des traductions arabes de super-héros américains, qui explique que les planches originales ont dû être retournées;
   - on pourra aussi comparer les couvertures des éditions en anglais et en arabe des comic-books de l'éditeur égyptien AK Comics pour voir quelles ne sont pas dans le même sens.

[36] Ce qui est tout à fait vrai. Mais qui est malheureusement largement ignoré.
Lire de droite à gauche n'est pas une spécificité japonaise, puisque l'arabe ou l'hébreu (par exemple) se lisent aussi dans ce sens. Ce n'est pas non plus une caractéristique de la langue japonaise, mais un effet de son lettrage vertical, comme F.B. l'explique juste après.
De là on pourra en déduire que le sens de lecture de la droite vers la gauche n'est ni une condition nécessaire, ni une condition suffisante pour faire un manga...

[37] On fera quand même remarquer qu'il existe quelques rares et spécifiques usages où le lettrage horizontal peut se lire de droite à gauche : écriture archaïque, enseigne...
Pour en savoir plus je vous renvois sur la page Wikipédia consacrée au sujet.

[38] Moralité (pour conclure ce compte-rendu et continuer dans la polémique) :
on pourra en conclure que publier hors du Japon des auteurs non-japonais, qui lettrent donc à l'horizontal, dans le sens de la droite vers la gauche (i.e. dans le sens inverse de lecture de leurs textes), c'est être plus japonais que les Japonais. Marketing quand tu nous tiens...

Remerciements : les invités de la conférence; Hervé et Manu pour les relectures; Du9 pour les idées de mise en page; Manu (encore) et L.T. pour l'aide avec HTML et CSS; Manu toujours pour les planches de super-héros israélien; Google...

Avertissement : le compte-rendu ci-dessus est issu de mes souvenirs et notes de la conférence. Même si il se veut le plus fidèle possible, il n'est vraisemblablement ni exact, ni complet à 100% . N'hésitez pas à me signaler toute erreur ou oubli !
La reproduction de ce texte est interdite sans mon accord préalable.
Crée le 11/02/2006 - Mis à jour le 28/03/2006
Contact : Mathieu LAGREZE